Gihapsul, ou la science de la Vie

David CONSTANT Par Le 05/11/2017 3

Dans Muye log

(article originalement paru dans le magazine Dragon Hors Série Aikidô d'avril 2017. Il a été légèrement modifié, notamment par l'utilisation exclusive de termes coréens)

GiKI, calligraphie du temple Kumanō Hongu Taisha, Wakayama, 2016

« Gi » est probablement le concept le plus galvaudé par les pratiquants d’arts martiaux, vu tantôt comme l’élément « magico-spirituel » qui rend invincible, tantôt comme une antique croyance dépassée par la biomécanique moderne, les deux se rejoignant souvent sur le terrain des préjugés hâtifs obtenus à partir d’une mince base de connaissance du sujet. Il est donc intéressant que le présent numéro de Dragon ouvre ses colonnes pour en discuter, le Gi étant de mon point de vue un des éléments essentiels de la pratique martiale.

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Pour l’introduire rapidement, le concept de Gi (, ) remonte au moins aux Royaumes Combattants de la Chine actuelle et est issu du Taoisme. Le Gi serait né de la polarisation du Do (, chin.= Tao) et du mouvement consécutif d’actions-réactions engendré entre les deux extrêmes (Taegeuk, 태극. 太極, chin.= Taiji), le Eum (., chin.= Yin) et le Yang (. , chin.= Yang). Comme tout mouvement de transformation physique, chimique ou biologique, le processus nécessite en amont, puis crée en aval, de l’énergie, connu ici sous le vocable « Gi », énergie créée et créatrice dans le même temps. Je n’irai pas plus loin dans la description du Gi macrocosmique car on entrerait dans des domaines qui dépassent de loin le monde martial.

À notre niveau, l’Homme se situe à l’exact centre des deux pôles extrêmes que sont la Terre et le Ciel, ce qui a donné par la suite le symbole de Cheonji'in (천지인. 天地人), autrement dit le fameux triptyque Ciel-Terre-Homme. L’Homme, tout comme les « 10 000 choses sous le Ciel » nécessite de l’énergie pour vivre, se déplacer, penser et crée, de par son existence même, de l’énergie à chacune de ses actions. Ce qui distingue l’Homme en revanche, c’est sa Volonté : on est toujours libre de suivre ou non les principes de la Nature. Voyant que l’Homme, du fait de sa capacité à choisir et par méconnaissance, se retrouve souvent à contrecourant du Tao, le Taoisme, pour qui la Voie de la Nature est la plus efficiente, prônera un retour à une harmonisation de l’Homme et des lois naturalistes du Tao. Pour revenir au sujet, l’Homme, consciemment ou inconsciemment, peut agir dans un sens générateur de Gi ou perturbateur de Gi, ce dernier étant contreproductif d’un point de vue Taoiste.

Pour finir ce tour d’horizon rapide, et même si d’autres contributeurs l’auront, comme je l’imagine, déjà fait, je veux faire un petit point linguistique. L’idéogramme représentant le Gi est formé des symboles du riz et de la vapeur, soit le double sens de l’énergie pour cuire le riz (et son action de transformer l’eau en vapeur) et de l’énergie générée par le riz cuit. On peut aussi y voir deux des éléments essentiels du perfectionnement énergétique que je développerai plus bas : nutrition et respiration. Enfin, le Gi est une notion très importante en Asie, et notamment au Japon (même si le sens étymologique a fini par se perdre), puisqu’il n’existe pas moins de 25 expressions utilisant le terme Ki dans son langage quotidien (ki ni suru, ki ga naru, ki ni doku, …).

Savoir utiliser son Gi est une science anciennement connue sous le nom de Gihapsul (기합술, 気合術), ou la science d’harmoniser les Gi, bien que ce terme soit lui aussi galvaudé par l’image des « maîtres ès cris » dans l’inconscient moderne. Je vais en décrire les 3 aspects qui nous intéressent en tant que pratiquants d’arts martiaux : tout d’abord, harmoniser mon Gi « sous ma peau », puis harmoniser mon Gi dans mes actions et, enfin, harmoniser mon Gi à celui de l’adversaire en vue de perturber le sien.

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Gi en absorption

Avant de pouvoir utiliser le Gi dans mes actions, il convient de savoir comment absorber, raffiner, stocker et répartir le Gi. Tout comme avec une automobile, indépendamment de la puissance du moteur, si le réservoir n’est pas plein d’essence, je risque de ne pas aller bien loin. Si j’ai une musculature très développée, de quelle utilité est-elle si je suis sans énergie, fatigué ou malade ? Domaine de la médecine traditionnelle  orientale (MTO), cette partie du Kiai no jutsu est généralement appelée Gigong (기공, 氣功), ou polissage du Gi. Pour commencer, il existe 4 Gi différents dans notre corps : Wongi, Jonggi, Yeonggi et Wigi.

 

Circulation

La petite circulation

 

1/ Wongi (원기, 元気) est l’étincelle première qui démarre le cycle de la vie, conservée dans les reins. On peut la comparer à un Big bang au niveau humain ou au démarreur au niveau de la voiture, à savoir celle qui lance le cycle vital. Il s’agit de l’énergie donnée par les parents lors de l’acte de procréation. Capital de départ, elle décroît avec l’âge, plus ou moins rapidement selon le train de vie mené. On ne peut agir dessus pour l’augmenter mais on peut la faire décroitre très rapidement si « on brule la vie par les deux bouts ».

2/ Jonggi (종기, 宗氣) est le comburant fourni par les poumons. La respiration symbolise le lien entre le macrocosme (Oegi, 외기, 外気, Gi externe) et le microcosme (Naegi, 내기, 内気, Gi interne) et elle agit en soufflant sur les braises du « chaudron alchimique », activant les 3 réchauffeurs (hanches, abdomen, torse). Comme tout feu, respirer trop fort soufflera la flamme, respirer trop peu l’étouffera. Les nombreux exercices taoistes, repris en partie par les Bouddhistes pour leur aspect facilitateur pour atteindre un état méditatif profond, reposent des principes généraux simples : respiration essentiellement abdominale, douce et arrondie, longue dans le temps mais avec amplitude moyenne, il s’agit de ne pas vider le poumon, ni de le gonfler à son maximum.

3/ Yeonggi (영기, 営気) est le carburant contenu dans la nourriture digérée par l’estomac. Nous abordons ici l’aspect nutritionnel du Gigong qui est, lui aussi, très riche. Comme il est nécessaire d’apporter au corps tous les éléments nutritifs dont il a besoin, le Taoisme préconise la diversité alimentaire en suivant le principe des 5 éléments (Ohaeng, 오행, 五行). En pratique, on cherchera à conjuguer, dans un repas à base de riz, les 5 saveurs (sucré, salé, pimenté, amer, acide), les 5 odeurs (rance, brûlé, parfumé, âcre, putride) et les 5 couleurs (bleu-vert, rouge, jaune, blanc, noir). Comme toujours, il convient d’éviter la sous-alimentation et la suralimentation, tout excès dans un sens ou un autre étant toujours évité autant que possible.

4/ Wigi (위기, 衛気) est la distribution de Gi aux organes via le sang distribué par le  cœur. Il permet de conserver un bon état de santé, ce qui fait qu’on le traduit généralement par « Gi défensif ». Pour cela, l’eau est l’élément important : une bonne hydratation permet aux organes de fonctionner en recevant oxygène, nutriments, … en quantité suffisante pour leur activité, tout en préservant le cœur d’une hyper ou d’une hypotension dommageable pour ses tissus.

5/ Juste pour compléter, même si aucun Gi particulier ne lui a été traditionnellement rattaché, je signale les intestins, cinquième organe important, pour leur rôle dans l’évacuation des déchets du processus alimentaire. Ici aussi, aller régulièrement à la selle (ni rarement, ni trop souvent) est essentiel à la bonne marche du corps humain.

Le Gi créé par le cycle ci-dessus est ensuite stocké dans des centres énergétiques appelés Danjeon (단전, 丹田), qui sont au nombre de 3, 5 ou 7 selon les Traditions. Les trois principaux sont : le Danjeon inférieur (Hadan Danjeon, 하단단전, 下段丹田), aussi appelé Jeha Danjeon (le Danjeon « sous le nombril », 제하단전, 下丹田) ou la mer de Gi (Gihae, 기해, 氣海), où justement est concentré le Gi créé et engagé ensuite dans toute activité physique ; le Danjeon central (Jungdan Danjeon, 중단, 中段丹田) situé au dessus du sternum, siège des émotions jugement et supérieur où est concentré un Gi raffiné en Shin (Esprit, 신, 神) ; et le Danjeon supérieur (Sangdan Danjeon, 상단단전, 上段丹田) localisé entre les sourcils et parfois appelé le troisième œil, où le Shin est encore raffiné en Non Intention (Muwi, 무위, 無為). L’énergie circule du bas vers le haut par un phénomène de capillarité verticale, ainsi un Hadan Danjeon faible ou mal alimenté aura des conséquences fâcheuses sur les Danjeon suivants.

Selon l’activité, que celle-ci soit consciente (couper du bois, courir, faire de la musculation, …) ou inconsciente (digestion, respirer, …), le Gi est distribué aux organes, muscles et tendons par l’intermédiaire des 12 méridiens ordinaires (Gyeongrak, 경락, 経絡), dont 5 sont rattachés aux organes décrits plus hauts, 6 à des entrailles et 1 à une fonction (le péricarde) ; et de 2 méridiens extraordinaires (Gigyeong, 기경, 奇経) que sont les méridiens gouverneurs et concepteurs (les 6 autres méridiens extraordinaires n’ont pas d’existence en tant que telle et empruntent leurs points d’acupuncture aux autres méridiens). Le Gi circule selon un cycle nycthéméral (24 heures) dans un ordre précis. Ces méridiens doivent aussi être entretenus afin que son flux ne soit pas bloqué et mal distribué, pouvant ainsi créer des lésions aux organes mal alimentés. Pour ce faire, il existe de nombreux exercices visant à détendre les méridiens comme le Goshin Taisō (護身体操), une routine issue du Hakkōryū Yawara ; à pratiquer des automassages comme le Doin (도인, 導引) ; ou à diriger le Gi via des exercices de visualisation comme la petite et la grande circulation céleste (Sojucheon, 소주천, 小周天 et Daejucheon, 대주천, 大周天), selon le principe que l’énergie suit la volonté.

Si l’on ne parvient pas à bien gérer son Gi soi-même, c’est alors qu’intervient le médecin acupuncture ou Shiatsushi afin de le rééquilibrer ou de libérer sa circulation dans les différents méridiens. Il dispose pour cela de nombreux outils comme la pharmacopée (Hanyak, 한약, 漢薬), l’acupuncture (Chimsul, 침술, 針術), le massage (Anma, 안마, 按摩), l’ostéopathie (Jeopgol, 접골, 接骨) ou encore la nutrition.

 

MeridiensLes 12 méridiens ordinaires et les 8 méridiens extraordinaires

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Gi en extériorisation (martiale)

Si tout ce qui a été décrit quant à la nutrition, la respiration et la circulation énergétique est bien appliqué, les résultats sont alors visibles extérieurement, aussi bien de par son état physique que de par ses actions. Ainsi, l’on disait qu’un Maître pouvait juger de la qualité du Gi d’une personne simplement en regardant un idéogramme tracé de la main de celle-ci : vigueur, paresse, finesse, fluidité, hésitation, tout ceci reflétait aussi bien son état physique, énergétique et mental.

 

ChoeLe professeur CHOE Yongsul : Jase et Balgyeong

 

Une personne au corps bien rempli de Gi est reconnaissable à son aspect physique général et à sa bonne santé. Concernant la structure physique (Jase, 자세, 姿勢), ses piliers diaphragmatiques (crâne, cervicales, thorax, pelvis) étant alignés sous l’effet d’une bonne respiration, sa colonne vertébrale est bien verticale. Ses pieds sont fermes sur le sol, sa tête cherche le Ciel. Son corps et ses muscles sont souples, détendus mais fermes dans le même temps, comme légèrement gonflé, comme s’il portait une « chemise, des gants et des chaussures de fer souple ». Sa peau est uniformément d’une couleur légèrement rosée, chaude et bien hydratée. Son haleine est fraiche, sa bouche humide.  La respiration est douce, stable, complète. Il a un corps sans douleur, ni blocage et ses sens (vue, ouïe, …) sont globalement bons. Son sommeil est réparateur, ses selles et urines sont aisées et sans odeur particulière.

Martialement, du fait de sa structure, de ses appuis forts et de la gestion de son poids (체주, 体重), cette personne aura un excellent équilibre et sera difficile à projeter. Autre conséquence, ce corps sans faille de Gi ne peut être aisément déstructuré (tout le monde connaît le test du bras impliable, par exemple). Même avec une force suffisante pour pousser ou tirer cette personne, sa détente corporelle permet de s’adapter rapidement et de retrouver un équilibre et une structure instantanément. Ses mouvements sont fluides, sans effort et sans essoufflement. Utilisant le Gi de la Terre, il marche comme un « Tigre grimpant la montagne », repoussant la terre ou en sautant. Utilisant le Gi du Ciel, il marche comme la « grue descendant du ciel », laissant faire la gravité ou en chutant.

L’aspect le plus connu du Gihapsul reste cependant le cri, ou plus précisément la sortie de voix (Balseong, 발성, 発声). Mais celle-ci n’est ni un moteur, ni la finalité d’une action, elle n’est que la conséquence d’un corps correctement rempli de Gi, de ses mouvements et de son intention. Ainsi, lors d’une coupe au sabre ou de l’application d’une technique à mains nues, de nombreux « Gihap sonores » (Yuseong Gihap, 유성기합, 有声気合) existent (les principaux étant Ae, Ya, To) mais la plupart du temps, le « Gihap muet » (Museong Gihap, 무성기합, 無声気合) lui est préféré. Dans la vie quotidienne, une personne pleine de Gi est reconnaissable à sa voix audible, claire et forte, qui porte loin, mais ce n’est pas un cri.

Enfin, une personne en plein de Gi aura une utilisation optimum de ses actions, d’où transparaitront force, précision et fluidité. Ceci est souvent la recherche d’une vie dans les Muye : la recherche du geste parfait. Plutôt qu’un geste utilisant la force musculaire, on recherche plus particulièrement les « sorties de force interne » (Balgyeong, 발경, 発勁), force prenant sa source dans le Hadan Danjeon, se propageant vers les membres distaux sous forme d’une onde de choc. Celle-ci agit comme un flux et un reflux de force, créant des pleins et des vides irrésistibles, d’une explosivité foudroyante. Sa propagation au travers de mon corps ne peut se faire que si celui-ci est en plein de Gi, le rendant détendu et puissant à fois, libre de toute entrave pour la propagation de l’onde. La force musculaire n’est alors pas du tout un prérequis pour obtenir un coup puissant, elle peut même être un handicap en rigidifiant excessivement le corps.

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Ki en perturbation

Ayant un obtenu un corps plein de Gi qui me permet d’agir puissamment, mon souci suivant est de me trouver face à un adversaire au moins aussi puissant que moi, rendant la victoire aléatoire. Mon but est alors de le priver de sa puissance, ou autrement dit de le vider de son Gi.

 

DesequilibreBangeoja est plein de Gi, Gonggyeokja voit le sien dispersé (déséquilibré et déstructuré)

 

Un combat devrait commencer par une analyse de l’adversaire au travers de la grille d’analyse du Gi. On a vu plus haut les effets visuels d’un corps plein de Gi. Cependant un adversaire peut être en trop plein de Gi : il sera alors généralement tendu et boursoufflé, brulant et rouge, en hyper ventilation (en respiration accélérée et sonore), souvent en surpoids et cambré, hyper dynamique, agité voire surexcité. Un adversaire avec un trop vide de Gi présentera des caractères opposés : hyperlaxe et resserré comme si sa peau était trop petite pour lui, blanc et froid, sous ventilé (presqu’en insuffisance respiratoire), maigre et recroquevillé, apathique. Au-delà de ces aspects généraux, qui permet déjà d’obtenir une tendance globale de l’adversaire, on pourra chercher, en examinant l’adversaire comme le ferait un médecin oriental pour établir son diagnostic visuel, les parties qui présentent des particularités, des déséquilibres énergétiques, des dissymétries avant-arrière, gauche-droite, haut-bas, chaud-froid, plein-vide, mobile-immobile, notamment concernant la croix formée par les épaules, les hanches et la colonne vertébrale. Stratégiquement, le principe reste globalement de vider ce qui est en plein et de remplir ce qui est vide. Mais les exceptions à cette règle sont nombreuses.

La première méthode consiste à bloquer ou disperser le Gi de l’adversaire. Ceci peut s’obtenir au moyen d’une frappe ou d’une pression sur ses points douloureux, généralement des points d’acupuncture (Gyeonghyeol, 경혈, 経穴). C’est le principe de la « main empoisonnée », où l’on cherche à rendre inopérant, en le privant de Gi, un membre distal ou un organe (en particulier le système respiratoire)

Ensuite, un principe cher au Hapgi consiste à déséquilibrer l’adversaire. Cela a pour conséquence de rigidifier sa structure corporelle dans une tentative de retrouver son équilibre en concentrant son Gi dans son centre (Jungshin, 중신, 中心). Ainsi, ses membres distaux se trouvant privés de Gi sont affaiblis et à la merci de la technique que je souhaite appliquer ensuite. A noter que le déséquilibre agit par un retrait de ses points d’appuis au sol, sa structure n’est pas nécessairement modifiée.

C’est par contre le cas quand je cherche à déstructurer mon adversaire : ses pieds restent souvent ancrés dans le sol mais son corps se trouve dans des postures à partir desquelles il ne peut plus utiliser sa force de manière optimale, voire ne peut carrément plus agir. Il s’agit de tordre ou plier ses membres distaux, son tronc ou ses cervicales selon des axes contraires (avant-arrière, gauche-droite, haut-bas ou vrille intérieure-extérieure). Cela a pour effet de disperser son Gi, comme l’essorage d’une serviette mouillée en extrait l’eau.

A un niveau plus subtil, on peut agir sur le Gi de l’adversaire en manipulant ses émotions. Le principe des 5 éléments distingue 5 émotions et leur action sur le Gi et les organes associés : la Joie (cœur) calme, relâche, affaiblit le Gi ; la colère (foie) fait monter le Gi à la tête ; l’anxiété (rate) immobilise le Gi ; la tristesse (poumons) fait disparaître, disperse le Gi ; et la peur (vessie) amène le Gi vers le bas. A un niveau mental, on entre dans les domaines de la suggestion, de la manipulation mentale et de l’hypnose, qui induisent tous un effet psychosomatique, donc des variations subtiles de Gi. A titre d’unique exemple, je peux par mes actions induire chez mon adversaire un changement de rythme de combat, en le ralentissant (son Gi se calme, me permettant une contre-attaque rapide à laquelle il ne pourra parer à temps) ou en l’accélérant (épuisant rapidement son Gi). C’est le même principe que celui décrit par Musashi Miyamoto dans son ouvrage, le « Gorin no Sho » (« faire bailler l’adversaire »).

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Une conclusion

Que l’on croie ou non à l’existence du Gi, ce principe reste une grille de lecture simple et pratique, faisant appel au ressenti, à l’observation interne et externe, ce qui parlera à un combattant qui n’a pas besoin de détails de niveau doctorat et inutiles au combat, moment brutal où la réflexion n’a que peu de place.

Évidemment, dans le cadre de ce magazine, mon exposé fait appel à votre réflexion, mais comme toute philosophie d’action, simple de compréhension intellectuelle, c’est dans sa mise en œuvre, de manière réflexe, que réside la difficulté à le faire vivre. Mais si l’on y parvient, on atteindra le fameux idéal du Jūdō : « maximum de résultat avec l’utilisation du minimum d’énergie » (Sēryoku zenyō, 勢力全容). L’idéal de tout combattant tient alors dans cette maitrise du Gi.

Commentaires

  • Cang NGUYEN

    1 Cang NGUYEN Le 06/11/2017

    Merci pour cet article qui permet de découvrir les termes coréens et l'unicité des connaissances médicales et martiales. Par contre, c'est la première fois que je lis kiaijutsu s'attache de près au qi gong :
    "cette partie du Kiai no jutsu est généralement appelée Gigong (기공, 氣功)"
    David CONSTANT

    David CONSTANT Le 19/11/2017

    C'est en effet peu courant, et je suis probablement le seul. Qigong et Kiaijutsu sont généralement vus comme deux éléments différents, l'un médical, l'autre guerrier. En outre, si on s'en tient uniquement au "cri" concernant le Kiai, c'et évidemment peu clair. Si par contre on en a la définition extensive que je donne dans l'article, c'est lus évident. Dans les écoles Hakkō que j'ai fréquentées, du fait de leur double nature martiale et médicale, il y a unicité de principe du Kiai : il est fondamental aussi bien pour sa santé et celle des patients que pour se battre. Bien qu'on n'y utilise jamais le terme de Kikō (Qigong), cette partie du travail du Ki en est objectivement, mais comme souvent au Japon, c'est un non-exprimé. A contrario, dans certaines écoles coréennes (notamment Seonmudo), on sépare les termes. Mais je n'y ai vu aucune contradiction à aucun moment, que ce soit dans la pratique du Gigong (Qigong) ou dans la pratique martiale, juste une différence de vocabulaire.
  • Cang NGUYEN

    2 Cang NGUYEN Le 21/11/2017

    Merci.
    Si on considère que le Ki est un matériau de base, il est cohérent de considérer des méthodes plus ou moins élaborées permettant de maintenir, renforcer et conduire le Ki. Autrement dit, on peut raisonnablement voir le kiko (pour donner un nom) comme une racine des pratiques internes.
    Le souffle ainsi disponible est ensuite utilisé suivant les 2 axes cités.
    Dans tous les cas, il existe un lien fondamental du Ki avec la structure corporelle, la respiration et l'intention.

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